C’était un grand départ auquel je me préparais. Trois pays en trois semaines ! Et pas des moindre, le Nicaragua, le Costa Rica et le Panama. J’avais l’habitude des voyages professionnels. Du coup, mon parcours était préparé aux petits oignons. Principalement des parcours complexes, de façon à voir si l’agence [Réceptive] de voyages que j’utilisais gère et travaille bien !
Je suis donc parti en Amérique Centrale y découvrir tous ses trésors. Mais j’allais spécialement rencontrer une ethnie, les Kunas. Ce peuple est celui qui proposa d’appeler le continent Abya Laya en 1992 auprès de tous les peuples indigènes des Amériques.
Les Kunas sont indépendants et depuis fort longtemps. Ils ont même une représentation au parlement panaméen. Ils gèrent l’éducation des enfants et la premières année en langue Kuna.
Les Kunas se trouvent dans un petit espace dans les Caraïbes. Une chance car c’est une zone où les ouragans ne passent jamais. C’est un paradis sur terre que peu de gens connaissent.
Mais ce qui m’intéresse, c’est surtout leur capacité à gérer leurs patrimoines, le fonctionnement de leur société et leurs propres structures hôtelières !
Une Erreur qui va changer ma vie
Mais le Panama ne fut pas la première destination de mon périple. J’ai commencé par le Nicaragua et j’arrive ensuite au Costa Rica. Mais ce que j’attendais avec impatience arrive vite… Le Panama.
Ma première escale, c’est Bocas del Toro, un archipel impressionnant. Puis je me tourne vers la capitale tout en attendant ce jour J, celui de ma rencontre avec les Kunas. Mais pour cela je dois me rendre au petit aéroport des vols nationaux de Panama City pour y prendre un avion qui angoisserait n’importe quel aviophobe digne de ce nom. Un boucan motorisé infernal qui frappe les tympans, une porte qui ne tient pas bien. Des voisins de voyages qui se retrouvent être des gallinacés et autres sortes animaux. Tout cela pour atterrir à San Blas, lieu où habitent les Kunas.
Ils m’y attendent sur une des îles pour partir en croisière dans toute la région. Trois jours de voyage pour y rencontrer tous les responsables de la zone et voir avec eux comment promouvoir les San Blas. Mais sur le tarmac… personne.
C’est là que je vois venir vers moi un Kuna, plutôt âgé, qui me demande ma destination. Je lui explique qui je suis et ce que je viens faire. Mais sa réponse ne m’enchante pas. Il m’explique que je me suis trompé de lieu, que je devais descendre du petit coucou quatre arrêts plus loin… J’ai commis une erreur… Mais tant pis, je lui fais comprendre que je vais attendre le prochain avion. Mais encore une fois, sa réponse n’est pas très positive… Ce sera demain en milieu d’après midi… Ma boulette semble donc être un peu plus grave que prévu !
Mais c’est parfois dans les erreurs que les plus belles rencontres se font. Il me propose de rencontrer le chef du village pour expliquer ma situation. J’accepte et le suis vers l’île du village. Son aspect donnait l’impression d’avoir à faire avec un vieux monsieur d’environ 200 ans… Mais il prend une toute petite pirogue et réussi avec une dextérité incroyable à m’emmener avec mes bagages sur l’île-village.
Une plongée au coeur du trésor des Kunas
A mon arrivée sur l’île, c’est presque une carte postale. Je suis accueilli avec des sourires et des regards curieux, le chef du village est sérieux mais doux et majestueux. Je n’ai donc aucune crainte à lui parler de mon problème.
Je suis tellement à l’aise que je lui explique même ne pas avoir assez de liquide et que je souhaite accéder à une banque pour retirer de l’argent (avec le recul c’était une question stupide…). Et il ne me tardera pas à me le faire remarquer en expliquant qu’aucune banque et aucun guichet ne se trouve à proximité. Il me tend le bras pour y découvrir le village de mes yeux et je me rend compte que chaque bâtiment est en bambou. Une seule chose en dur… L’église. Le seul bâtiment qu’ils n’utilisent visiblement pas !
Je recherche donc désespérément un endroit pour passer la nuit. Il me demande si j’ai un peu d’argent et je lui file l’équivalent d’une vingtaine d’euros. Visiblement c’est bien assez. Il me garde pour la nuit, me nourrit et surtout, me propose de visiter les environs. Enfin une bonne nouvelle.
C’est son fils qui me conduira lors de mes visites. Il semble être très agréable, et la suite des événements ne fera que confirmer ma première impression. Il m’indique que je dormirai sur un hôtel/île, un concept pas encore au point… Mais à l’arrivée sur le lieu en question, je me retrouve face au paradis. Une cabane au milieu d’une île, où il n’y a que moi et l’eau transparente.
Je m’installe rapidement. Ils reviennent vite sur les lieux pour me laisser un déjeuner constitué de langoustes délicieuses et fraîches, pêchées du matin. Le fils du chef viendra me chercher en début d’après-midi pour les visites.
L’objectif ? Découvrir la faune aquatique de la région. Je m’équipe en conséquence avec masque, palmes et tuba. Je suis impatient comme un gosse qui découvre les cadeaux de Noël sous le sapin. Je trépigne d’impatience
J’embarque avec lui et nous allons aux détours d’une île. Enfin sur un mini îlot et il m’y laisse tranquille. J’ai donc tout le temps de partir à la découverte du fond marin et là j’ai un choc. Depuis mon premier passage aux Philippines, je n’ai jamais vu un milieu aussi foisonnant de couleurs et de vies ! C’est sublime, paradisiaque, psychédélique, tout ce voyage pourrait se résumer à cette mini plongée !
Je m’approche d’un poisson scorpion. Mais vite, mon accompagnateur plonge avec moi pour m’interdire de m’approcher plus. Il me dit que ce poisson est plutôt agressif et dangereux. Je le savais, mais je l’écoute et me tiens à distance, je regarde les tortues passer et je m’immerge en “mer nature”.
La nuit tombe. Et pour clôturer cette journée, je déguste un dîner simple et copieux en fruits de mer. Je dors dans mon petit cabanon, sans fenêtre mais avec toutes les nécessités habituelles d’un européen sans l’électricité. C’est une nuit magique.
Un regard d’occidental qui découvre la vie humaine
Le lendemain, c’est là que je pars à la découverte des Kunas et de leur mode de vie. J’admire le village plein de vie et de joie, des femmes qui oeuvrent à briser des grains de je ne sais quoi. Avec mon regard de voyageur, je les trouve magnifiques avec leurs tissus majestueux et leurs sublimes tatouages.
Les Kunas vivent dans une société matrilocale. La femme reste dans son village et c’est son mari qui s’installe avec elle et non l’inverse. La vie du village est gérée délicatement par le chef de tribu. Ils ont de quoi faire avec la pêche, la culture, la navigation et les forêts tropicales des environs. Ils sont presque en total autonomie.
C’est un moment éternel dans mon esprit qui s’imprime. Je me sens proche de l’apaisement et de la tranquillité. Le moment de repartir arrive bien trop rapidement à mon goût.
Ils m’accompagnent à l’avion et me disent au revoir. Je sens que je ne reviendrais pas souvent dans ce coin reculé du Monde. Mais ces deux jours m’ont considérablement modifié dans ma façon d’appréhender la vie et la façon de vivre en occident.
Les Kunas n’ont pas beaucoup de matériels à disponibilité, ils vivent beaucoup de la noix de coco et de la revente de leurs magnifiques créations, les tissus Mola. Ils m’ont pourtant chamboulé au plus profond de moi-même.